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prendre l’allusion. Il pressa, sans mot dire, la main de son ancien camarade. Ce dernier, reprenant son sérieux, changea aussitôt de ton.

— Je suis heureux de te rencontrer, car je t’aurais écrit aujourd’hui ou demain. Et, afin que tu le saches, je dois t’avouer qu’après notre première entrevue, je m’étais permis d’annoncer à Buenos-Ayres que je venais de découvrir la perle des successeurs. Naturellement je parlais de toi. Depuis hier, je suis en possession de la réponse. Ma proposition a été bien accueillie, une preuve, entre autres, que j’ai laissé un bon souvenir de l’autre côté de l’Atlantique. Tu tiens donc ta destinée entre tes mains. Si tu acceptes, et je te le conseille, ton acte de nomination te sera délivré au nom du gouvernement, par le représentant de la République Argentine, résidant à Berne. C’est à présent le temps le plus favorable pour voyager ; c’est même très avantageux pour toi que tu sois quelques semaines là-bas avant d’entrer en fonctions, afin, comme l’on dit, que tu puisses prendre langue et t’habituer aux mœurs et au climat du pays.

— Je te remercie, répondit Jean, en pressant de nouveau avec chaleur la main de son ami, je te remercie mille fois. Tu ne te fais aucune idée de la joie que j’aurais à partir, à m’éloigner d’ici. Et, cependant — c’est étrange, vraiment ! — il m’est toujours impossible, pour l’instant, de donner mon consentement définitif.

— Tu hésites encore ? Qui ne hasarde rien, n’a rien. Il faut te décider. La chose presse.

— Je le comprends. Eh bien, seras-tu content si je te promets que dans vingt-quatre heures, soit demain soir, tu auras ma réponse ?