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la patricienne

vre, ni le voir. Croyez-moi ! Cet homme, quand même il tiendrait sa parole, est incapable de vous rendre heureuse. Vous avez probablement toute cette nuit devant vous ; le sommeil, d’ailleurs, fuira vos paupières. Eh bien, écrivez à votre père, confessez-lui votre situation, implorez son pardon, et demandez-lui enfin qu’il vous rouvre la porte du presbytère qui vous a vue naître. Un père n’est pas insensible aux prières de son enfant. Vous recommencerez une autre vie et le passé s’effacera.

En admettant encore, continua Almeneur, que M. de Rosenwelt ne soit qu’un simple chevalier d’industrie, qu’il n’ait, en d’autres termes, commis d’autres crimes que de faire des dettes et d’avoir inutilement dépensé son existence — vous l’avez dit, il n’aime que soi et s’il vous a jamais aimée, il ne vous aime plus. C’est peut-être cruel de vous parler ainsi, mais il vaut mieux couper le mal que de le guérir à moitié. Au surplus, et vous en convenez vous-même, ce n’est pas l’homme à lier son sort à celui d’une pauvre femme qui ne lui offrirait que son cœur. Je verrai demain l’ambassadeur, sinon, son secrétaire. Ils s’empresseront, j’en suis certain, de prendre les mesures nécessaires pour votre retour à la maison paternelle.

Et elle avait promis de suivre ces conseils. Ensuite le docteur s’était éloigné et, une fois à la porte de la villa de Beau-Port, il avait gagné sa chambre sans déranger personne. Tout habillé, il s’était jeté sur sa couche ; brisé de fatigue, il avait dormi tout d’un somme pour se réveiller au chant des oiseaux qui saluaient à leur manière le lever du soleil.

Il sauta hors du lit, fit sa toilette à la hâte et sortit