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de l’acheter pour Dougaldine ; mais il n’osa. Et, comme il ne vint pas à l’esprit d’Amédée de le faire, il prit quand même ces fleurs symboliques, glissa une pièce blanche dans la main de la fillette et déposa la couronne sur le coussin du landau, mais sans prononcer aucune parole. Ensuite, Amédée ayant recommandé au cocher d’inviter M. de Rosenwelt à profiter de l’occasion, dans le cas où il le rejoindrait, la voiture reprit le chemin de Beau-Port, tandis que le maître et son élève s’engageaient enfin dans la montagne.

La recommandation d’Amédée était bien inutile : Max de Rosenwelt et son compagnon avaient pris par un sentier qui, tout en courant à travers les collines parallèlement à la voie publique, était cependant assez éloigné de cette dernière pour qu’on ne pût les apercevoir…

Le tableau qui se déroulait sous les yeux de nos voyageurs, à mesure qu’ils montaient, devenait de plus en plus digne de leur attention. La route, en une pente assez rapide, serpentait le long d’un ravin escarpé, au fond duquel roulait la rivière, grossie par la fonte des dernières neiges. De magnifiques forêts ombrageaient les lianes des premières terrasses alpestres qui s’étageaient les unes au-dessus des autres, en un ordre sauvage. Sur l’un des côtés du chemin, on voyait des chalets, construits souvent avec beaucoup de goût et de style et qu’entouraient des prairies fertiles, plantées d’arbres fruitiers. Les érables mêlaient leur feuillage clair à celui plus sombre des sapins. Et, afin que le caractère romantique de la vallée fût bien complet, une vieille tour démantelée, couronnée de lierre et de buissons, se dressait au