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la patricienne

Le soleil ne tarda pas à se montrer. La magique féerie de son lever éclata soudain aux yeux émerveillés des deux jeunes gens. En quelques instants, ses rayons inondèrent les pentes des collines d’une douce lumière matinale. Sur la pointe des montagnes, à l’orée des forêts profondes, près des villages clairsemés, au-dessus desquels se dressaient déjà des colonnes de fumée, on voyait la faulx des faucheurs resplendir tout à coup, comme un éclair rapide. L’air était pur et vif. À côté du chemin, une rivière roulait ses eaux blanchâtres qui passaient, en bonds désordonnés, sur des rochers ou de grosses pierres errantes. On entendait, très loin et très haut, le chant d’un pâtre sur l’autre rivage ; la cloche d’une petite église égrenait ses sons argentins dans les premières clartés du jour. Et, dominant ce tableau, d’une beauté grandiose, les Alpes développaient leurs pyramides géantes, tandis que, à leur pied, le feuillage sombre du sapin recouvrait des sommités plus basses. Par-ci, par-là, rompant l’uniformité de la teinte, d’immenses rochers, pour ainsi dire taillés en châteaux forts du moyen âge, avaient l’air d’être là pour défendre l’entrée du pays.

Après une course de trois heures, ils atteignirent enfin Schwarzbach, un assez grand village où la vallée se partage en deux autres vallées plus petites. Il fallait suivre celle de gauche pour se rendre chez le père du docteur.

La voiture s’était arrêtée devant l’Hôtel de l’Ours. Le cocher ne détela pas ses chevaux ; il leur fit donner simplement deux rations d’avoine, car, après une halte de quelques minutes, il allait conduire encore son jeune maître et le précepteur jusqu’à