Page:Widmann - La Patricienne, trad P César, 1889.djvu/115

Cette page a été validée par deux contributeurs.
113
la patricienne

mademoiselle, vous concluez de même avec une virile netteté. J’ai le plaisir de vous dire que nous sommes parfaitement d’accord.

— S’il en est ainsi, reprit-elle, eh bien, prêtez-moi pour quelque temps, afin de compléter mon instruction, une histoire de la littérature allemande, dans le cas où vous auriez un tel livre à ma disposition. Vous avez éveillé ma curiosité.

Ce désir appela un éclair de joie dans les yeux du docteur. Il s’empressa de répondre :

— Vous serez satisfaite à l’instant même. J’ai pris avec moi l’excellent ouvrage de Guillaume Scherer.

— Mais peut-être que vous vous en servez, objecta timidement Dougaldine, qui semblait déjà regretter ses paroles.

— Nullement. J’aime tant ce volume que je ne voulais pas le laisser à Berne. Je le traite un peu en ami. D’ailleurs, je le sais pour ainsi dire par cœur. C’est assurément un des meilleurs du genre.

Et, sans tarder plus longtemps, Jean alla chercher ce livre.

Dougaldine le lut d’un trait. Il lui fut même bientôt impossible de s’en séparer. Dans le parc ou dans sa chambre, elle l’avait entre les mains, des heures entières, et ne le fermait qu’avec regret. Peu de jours après, elle faisait venir d’autres ouvrages de Berne, qu’elle-même avait commandés. Car cette étonnante personne ne se contentait pas seulement des jugements qu’on portait sur tel ou tel écrivain ; elle voulait aussi connaître ses œuvres, les lire, pour en avoir une idée, une clarté, comme dit Molière, plus fraîche, plus durable et plus exacte. Et ces lec-