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ESCALADES DANS LES ALPES.

des terrasses couvertes de neige) parce que la neige ne pouvait y séjourner.

La configuration générale de la montagne me confirmait dans l’espoir que sa structure faciliterait une ascension par le versant oriental, bien qu’elle s’y opposât sur toutes ces autres faces. Regardez n’importe quelle photographie du Cervin prise du nord-est (les profils placés en regard de la page 348 ont été soigneusement dessinés d’après une photographie), et vous remarquerez sur le versant droit (celui qui regarde le glacier de Z’Mutt) une série non interrompue de rochers qui surplombent et de pentes inclinées à l’extérieur. En somme, tout ce versant offre les caractères indiqués par la figure 1, page 318, tandis qu’à gauche (côté du sud-est), la forme générale des rochers rappelle celles de la figure 2. On ne saurait donc douter que les contours de la montagne, vus de cette direction, résultent en grande partie de l’inclinaison générale des couches qui la composent.

Ce n’était donc nullement par caprice que j’avais engagé M. Reilly à se joindre à moi dans une tentative d’ascension par le versant oriental ; j’avais peu à peu acquis la conviction que ce versant nous offrirait le chemin le plus facile pour atteindre le sommet. Si nous n’avions pas été obligés de nous séparer, le Cervin eût été escaladé en 1864.

En descendant le glacier de Z’Mutt pour revenir à Zermatt, nous nous arrêtâmes afin d’examiner le Cervin de profil ; mes guides reconnurent de suite qu’ils s’étaient trompés jusqu’à ce jour sur la raideur des pentes du versant oriental. Cependant ils ne le jugeaient pas encore bien facile à escalader. Almer et Biener refusèrent nettement de tenter l’ascension de ce côté. Je cédai pour le moment à leur répugnance évidente. Nous fîmes donc l’ascension du Théodulhorn afin d’examiner une route que j’appellerai alternative, c’est-à-dire qui monterait tantôt sur un versant, tantôt sur l’autre, et qui, devant passer presque constamment sur la neige, leur paraîtrait peut-être préférable à l’autre.