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FEUILLES D′HERBES


Le génie des poètes de l’ancien monde,
Qui, dirigeant sur moi ses regards de flamme,
Et montrant du doigt maints chants immortels,
Que chantes-tu, dit-il d’une voix menaçante,
Ne sais-tu qu’il n’est qu’un seul thème pour les bardes impérissables ?
Et c’est le thème de la Guerre, la fortune des combats,
La création de soldats accomplis.

Soit, répondis-je alors,
Moi aussi, Ombre hautaine, je chante la guerre, et une plus longue et plus grande qu’aucune,
Faite dans mon livre avec fortunes diverses, fuite, avance et retraite, victoire différée et incertaine,
(Cependant certaine, m’est avis, ou quasi certaine, à la fin), sur le champ de bataille du monde,
Pour la vie et la mort, pour le Corps et pour l’Âme éternelle,
Vois donc, moi aussi je suis venu, chantant le chant des combats,
Je suscite surtout de braves soldats.




EN MER SUR DES NAVIRES


En mer sur des navires avec leur cajute,
Le bleu sans bornes s’étendant de toute part,
Avec vents qui sifflent et musique des vagues, les grandes
vagues impérieuses,
Ou quelque barque solitaire portée sur la mer dense,
Où, joyeux et plein de foi, déployant ses voiles blanches,
Le bateau fend l’éther parmi l’écume étincelante du jour,
ou sous maintes étoiles la nuit,