méprisait Starkfield, mais elle était incapable de vivre dans un endroit qui l’eût méprisée, elle. Même à Bettsbridge ou à Shadd’s Falls elle n’eût pas pu jouer un rôle suffisamment important ; et dans les villes qui attiraient Ethan elle eût encouru une perte totale de sa personnalité.
D’ailleurs, moins d’un an après leur mariage s’était développée la « nature maladive » qui lui avait donné depuis une certaine célébrité, même dans un pays où les cas pathologiques abondaient au point de former un des principaux sujets de conversation. Quand elle était venue soigner la vieille Mrs. Frome, Ethan avait été séduit par l’air florissant de sa cousine ; mais il ne tarda pas à comprendre que ses qualités de garde-malade avaient pour cause l’étude constante de son propre état.
Puis, peu à peu, elle aussi était devenue silencieuse. Peut-être était-ce l’inévitable résultat de la vie à la ferme, ou encore, comme elle disait quelquefois, parce que son mari « n’écoutait jamais ». Ce reproche n’était pas tout à fait immérité. Quand Zeena parlait, ce n’était guère que pour se plaindre de choses auxquelles il ne pouvait remédier ; et pour vaincre une tendance naturelle à la riposte il avait d’abord pris l’habitude de ne pas répondre, puis finalement de penser à autre chose durant les discours de sa femme.