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effet que de ralentir encore le pouls déjà paresseux de Starkfield.

Après quelque temps de séjour, quand, j’eus vu succéder à cette période de clarté cristalline de longs intervalles d’un froid sans soleil, quand les rafales de février eurent dressé leurs tentes blanches autour du village perdu, et que la tumultueuse cavalerie des vents de mars fut venue à leur rescousse, je commençai à comprendre pourquoi Starkfield émergeait de ce siège comme une garnison affamée qui se rend sans conditions. Vingt ans plus tôt, en effet, les moyens de résistance avaient dû être bien moindres encore, et l’ennemi maître de presque toutes les lignes entre les villages investis.

En songeant à tout cela je sentis toute la sinistre portée de la phrase de Harmon : « Les malins, eux, s’en vont. » Mais si tel était le cas, quels obstacles accumulés avaient pu empêcher l’évasion d’un homme comme Ethan Frome ?

Je logeais chez une veuve entre deux âges qu’on appelait familièrement Mrs. Ned Hale. Elle était fille de l’ancien notaire du village, et « la maison du notaire Varnum », qu’elle occupait avec sa mère, était l’habitation la plus considérable de Starkfield. La vieille demeure à fronton classique s’élevait au bout de la rue principale du village. Ses fenêtres à