Page:Wharton - Les Metteurs en scène, 1909.djvu/319

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ments. Il se nourrit de noisettes et de racines, de truites que de ses mains il capturait sous les pierres du ruisseau.

De tout temps, ç’avait été un enfant tranquille, aimant à demeurer assis aux pieds de sa mère, regardant s’épanouir les fleurs sous l’aiguille, tandis que l’aumônier lisait l’Histoire des Pères du désert dans un grand livre aux fermoirs d’argent. Il eût souhaité d’être élevé en clerc ou en érudit plutôt qu’en fils de chevalier ; et ses instants les plus heureux étaient ceux où il servait la messe pour le chapelain, de grand matin, sentant son cœur s’envoler de plus en plus haut, telle une alouette, jusqu’à se perdre dans l’infini de l’espace et de la lumière. Heureuses presque au même point avaient été les heures passées auprès du peintre étranger venu d’au delà des monts pour décorer la chapelle, et sous le pinceau duquel les visages célestes semblaient sortir de la muraille ; comme s’il eût semé quelque graine enchantée qu’on eût vu germer sous le regard. À mesure qu’un nouveau visage nimbé d’or apparaissait, l’enfant sentait qu’il avait fait la conquête d’un nouvel ami, d’un ami qui viendrait, la nuit, se pencher sur lui, écartant de son oreiller les vilaines visions, les visions de monstres voraces qui sont aux porches des églises, des chauves-souris et