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ment que l’on prenait n’amoindrissait en aucune façon le respect de soi-même.

La nature de leur attachement plaçait Westall et Julia tellement au-dessus de semblables éventualités qu’il leur était facile d’en discuter librement. Ils avaient même à tel point le sentiment de leur parfaite sécurité que Julia avait pris l’habitude d’insister tendrement sur la promesse que lui avait faite Westall de réclamer son dégagement quand il cesserait de l’aimer. L’échange de ces vœux semblait les rendre, dans un sens, les champions de la nouvelle loi, les pionniers dans le pays encore inexploré de la liberté individuelle : ils sentaient qu’ils avaient en quelque sorte atteint la félicité sans avoir passé par le martyre.

À cet instant où elle se remémorait son passé, Julia voyait nettement que telle avait été son attitude théorique vis-à-vis du mariage. C’était inconsciemment, insidieusement, que ses dix ans de bonheur avec Westall avaient produit une autre conception de ces liens, et comme un retour au vieil instinct de possession et de dépendance passionnée qui, aujourd’hui, la faisait bondir à la seule pensée de changement.

Changement ? Renouvellement ? Étaient-ce bien les mots qu’ils avaient employés dans leur absurde jargon ? C’eût été bien plutôt destruction,