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Étouffé l’Esprit pur sous la Matière immonde,
D’un abject Égoïsme exaucé tous les vœux,
Placé l’Impiété sur le trône du monde,
Et mis le Désespoir au premier rang des Dieux.

Le Forum, grâce à vous, n’est qu’une impure arène,
Noir dépôt du torrent des révolutions,
Où vingt chefs opposés, égarés par la haine,
Se livrent, chaque jour, des combats furibonds,
Pour asseoir leur puissance et fonder leur empire
Sur les restes fumants de quelques libertés,
Qu’un peuple fatigué leur livre en son délire
En échange de pain et des jeux des cités.

L’Art lui-même est déchu de sa sainte nature.
Noir fantôme des nuits, à l’œil sombre et hagard,
Un lambeau de linceul compose sa parure,
Et le sang, sur sa joue, a remplacé le fard,
Et de son gosier sourd, rongé par des ulcères,
Ne s’échappent au loin que d’horribles serments,
Toujours entrecoupés de baisers adultères,
Ou de funèbres hurlements.

Le Théâtre surtout, qui, dans les temps antiques,
D’un échafaud sublime empruntant la terreur,
Montrait à tous le vice, au nom des mœurs publiques,
Flagellé par le bras d’un poëte vengeur,