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Et je languis toujours au fond de la cellule
Où sur un lit d’exil le soldat m’a trouvé,
Maudissant ma jeunesse et rongeant la férule
Qui déchira les flancs de l’ange réprouvé.

Du grand fleuve de Varsovie
Novembre a déchaîné les flots ;
Mars a réveillé l’Italie
Du fond d’un ignoble repos ;

Et je rampe toujours sous le poids de l’attente,
Dans mon ciel ténébreux nul astre n’a paru ;
Je n’ai pas vu du camp se déployer la tente,
Et le tambour pour moi n’a pas encor battu.

Pourtant le vieux soldat croit à ses prophéties ;
Et n’a pas abdiqué le belliqueux espoir
De me conduire, un jour, au feu des batteries,
Sur son grand cheval noir.

Il me parle toujours de la noble bannière.
Qu’au mépris des boulets sifflant à ses côtés,
Il planta, le premier, au seuil de la frontière,
Quand Brunswick apparut dans nos champs attristés,
Et que, vingt ans plus tard, il ramena sans tache
D’un roc de la Toscane, avec l’homme au grand nom
Qui, sur son lit de mort, anoblit sa moustache
D’un baiser immortel qui valait un blason.