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murmure plaintif des vents et des arbres ; voilà l’enfer d’Empedocle, voilà cet océan d’air louche et blanchâtre qui pousse et repousse les âmes coupables, soit à travers les plaines des airs, soit au milieu des globes semés dans l’espace. »

Ces derniers traits me semblent néanmoins convenir bien mieux encore à une autre montagne helvétique, appelée le Mont-Gemmi, dont il me reste à vous exposer les avantages et les horreurs. Elle est située en face du Simplon, à l’autre rive du Rhône, entre le canton de Berne et le Valais. Je crois que c’est la cour assidue que j’ai faite à cette montagne, qui m’a valu de pouvoir envisager celle du Simplon avec beaucoup plus d’exactitude et de sang-froid. Le Mont-Gemmi n’est exactement qu’un composé d’horreurs entassées les unes sur les autres, et qui a pu les passer une fois, perd toute espèce de crainte, comme ceux qui avaient passé le fleuve Lethé perdaient tout souvenir ; mais on peut en tirer aussi un parti très-avantageux, de cette montagne si effrayante ; il y a déjà un chemin de tracé. Sur le compte que j’ai rendu au ministre Reinhard et au gouvernement Helvétique, de l’inappréciable communication que l’on pouvait établir par le Mont-Simplon et le Mont-Gemmi, entre la France et l’Italie, déjà cette communication a été singulièrement facilitée ; et il ne tient qu’aux généraux français en Italie, ainsi qu’aux gouvernans Italiens, de communiquer avec la France par un chemin de quatre-vingts lieues plus court que celui qui passait pour le moins long. Les troupes, les prisonniers, l’artillerie, les transports d’argent peuvent également en faire leur profit ; et je ne doute pas que le premier Consul ne mette le sceau à une campagne qui le couvre de tant de gloire, par la création d’une route qui manqua à celle du vainqueur des Gaules, à celle de Jules César même.