Page:Wells Ile du Docteur Moreau 1896.djvu/88

Cette page a été validée par deux contributeurs.
76
l’île du docteur moreau

ennemi en retraite, et soudain mon intense surexcitation m’abandonna. Je me mis à trembler et une sueur froide m’inonda, pendant qu’il fuyait et que je restais là avec mon arme inutile dans la main.

Un bon moment s’écoula avant que je pusse me résoudre à descendre, à travers le bois et les taillis, le flanc du promontoire jusqu’au rivage. Enfin, je les franchis en un seul élan et, comme je sortais du fourré et m’engageais sur la plage, j’entendis les craquements des pas de l’autre lancé à ma poursuite.

Alors la peur me fit complètement perdre la tête et je me mis à courir sur le sable. Immédiatement, je fus suivi par ce même bruit de pas légers et rapides. Je poussai un cri farouche et redoublai de vitesse. Sur mon passage, de vagues choses noires, ayant trois ou quatre fois la taille d’un lapin, remontèrent le talus en courant et en bondissant. Tant que je vivrai, je me rappellerai la terreur de cette poursuite. Je courais au bord des flots et j’entendais de temps en temps le clapotis des pas qui gagnaient sur moi. Au loin, désespérément loin, brillait faiblement la lueur jaune. La nuit, tout autour de nous, était noire et muette. Plaff ! Plaff ! faisaient continuellement les pieds de mon ennemi. Je