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l’île du docteur moreau

dres à l’endroit où les corps étaient tombés, et, du pied, je remuai le sable, jusqu’à ce que les traces de sang eussent disparu.

Je renvoyai mes trois serfs d’un geste de la main et, montant la grève, j’entrai dans les fourrés. Je tenais mon revolver, et mon fouet était suspendu, avec les hachettes, à l’écharpe de mon bras. J’avais envie d’être seul pour réfléchir à la position dans laquelle je me trouvais.

Une chose terrible, dont je commençais seulement à me rendre compte, était que, dans toute cette île, il n’y avait aucun endroit sûr où je pusse me trouver isolé et en sécurité pour me reposer ou dormir. Depuis mon arrivée, j’avais recouvré mes forces d’une façon surprenante, mais j’étais encore fort enclin à des nervosités et à des affaissements en cas de véritable détresse. J’avais l’impression qu’il me fallait traverser l’île et m’établir au milieu des bipèdes humanisés pour trouver, en me confiant à eux, quelque sécurité. Le cœur me manqua. Je revins vers le rivage, et, tournant vers l’est, du côté de l’enclos incendié, je me dirigeai vers un point où une langue basse de sable et de corail s’avançait vers les récifs. Là, je pourrais m’asseoir et réfléchir, tournant le dos à la mer et faisant face