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l’île du docteur moreau

mais telle était ma résolution. Je redoutais ce monstre plus que n’importe quelle autre des bêtes humanisées. Son existence était, je le savais, une menace pour la mienne.

Pendant une dizaine de secondes, je rassemblai mes esprits.

— Saluez ! À genoux ! ordonnai-je.

Il eut un grognement qui découvrit ses dents.

— Qui êtes-vous pour… ?

Un peu trop nerveusement peut-être, je levai mon revolver, visai et fis feu. Je l’entendis glapir et la vis courant de côté pour s’enfuir ; je compris que je l’avais manquée et, avec mon pouce, je relevai le chien pour tirer de nouveau. Mais la bête s’enfuyait à toute vitesse, sautant de côté et d’autre, et je n’osai pas risquer de la manquer une fois de plus. De temps en temps, elle regardait de mon côté, par-dessus son épaule ; elle suivit, de biais, le rivage, et disparut dans les masses de fumée rampante qui s’échappaient encore de l’enclos incendié. Je restai un instant, les yeux fixés sur l’endroit où le monstre avait disparu, puis je me retournai vers mes trois bipèdes obéissants et leur fis signe de laisser choir dans les flots le cadavre qu’ils soutenaient encore. Je revins alors auprès du tas de cen-