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l’île du docteur moreau

les autres choses… Qu’adviendra-t-il des monstres après cela ?

— Je n’en sais rien. Je suppose que ceux qui ont été faits avec des bêtes féroces finiront tôt ou tard par tourner mal. Nous ne pouvons les massacrer tous, n’est-ce pas ? Je suppose que c’est ce que votre humanité pouvait suggérer ?… Mais ils changeront, ils changeront sûrement.

Il parla ainsi à tort et à travers jusqu’à ce que je sentisse la patience me manquer.

— Mille diables ! s’écria-t-il à une remarque un peu vive de ma part, ne voyez-vous pas que la passe où nous nous trouvons est pire pour moi que pour vous ?

Il se leva et alla chercher le cognac.

— Boire ! fit-il en revenant. Vous, discuteur, gobeur d’arguments, espèce de saint athée blanchi à la chaux, buvez un coup aussi.

— Non, dis-je, et je m’assis, observant d’un œil sévère, sous la clarté jaune du pétrole, sa figure s’allumer à mesure qu’il buvait et qu’il tombait dans une loquacité dégradante. Je me souviens d’une impression d’ennui infini. Il pataugea dans une larmoyante défense des bêtes humanisées et de M’ling. M’ling, prétendait-il, était le seul être qui