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l’île du docteur moreau

saurais donner de raison, que ces étranges créatures, ces femelles, eurent, dans les premiers temps de mon séjour, le sens instinctif de leur répugnante apparence et montrèrent, en conséquence, une attention plus qu’humaine pour la décence et le décorum extérieur.

Mais mon inexpérience de l’art d’écrire me trahit et je m’égare hors du sujet de mon récit. Après que j’eus déjeuné avec Montgomery, nous partîmes tous deux pour voir, à l’extrémité de l’île, la fumerolle et la source chaude dans les eaux brûlantes de laquelle j’avais pataugé le jour précédent. Nous avions chacun un fouet et un revolver chargé. En traversant un fourré touffu, nous entendîmes crier un lapin ; nous nous arrêtâmes, aux écoutes, mais n’entendant plus rien nous nous remîmes en route et nous eûmes bientôt oublié cet incident. Montgomery me fit remarquer certains petits animaux rosâtres qui avaient des pattes de derrière fort longues et couraient par bonds dans les broussailles ; il m’apprit que c’étaient des créatures que Moreau avait inventées et fabriquées avec la progéniture des grands bipèdes. Il avait espéré qu’ils pourraient fournir de la viande pour les repas, mais l’habitude qu’ils avaient, comme parfois les lapins, de dévorer