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l’île du docteur moreau

Montgomery le suivait. Son œil rôdeur remarqua la position de mon bras et il sourit de travers.

Le puma, ce jour-là, restait en repos pour hâter sa guérison ; mais Moreau, dont les habitudes étaient singulièrement solitaires, ne se joignit pas à nous. J’entamai la conversation avec Montgomery pour éclaircir un peu mes idées au sujet de la vie que menaient les bipèdes du navire. Je désirais vivement savoir, en particulier, comment il se faisait que ces monstres ne tombaient pas sur Moreau et Montgomery et ne se déchiraient pas entre eux.

Il m’expliqua que leur relative sécurité, à Moreau et à lui, était due à la cérébralité limitée de ces monstres. En dépit de leur intelligence augmentée, et de la tendance rétrograde vers leurs instincts animaux, ils possédaient certaines idées fixes, implantées par Moreau dans leur esprit, qui bornaient absolument leur imagination. Ils étaient pour ainsi dire hypnotisés, on leur avait dit que certaines choses étaient impossibles, que d’autres ne devaient pas être faites, et ces prohibitions s’entremêlaient dans la contexture de leurs esprits jusqu’à annihiler toute possibilité de désobéissance ou de discussion. Certaines choses, cependant,