Page:Wells Ile du Docteur Moreau 1896.djvu/100

Cette page a été validée par deux contributeurs.
88
l’île du docteur moreau

moyen de me procurer de la nourriture. Je savais trop peu de botanique pour découvrir autour de moi la moindre ressource de racine ou de fruit ; je n’avais aucun piège pour attraper les quelques lapins lâchés dans l’île. Plus j’y pensais et plus j’étais découragé. Enfin, devant cette position sans issue, mon esprit revint à ces hommes animalisés que j’avais rencontrés. J’essayai de me redonner quelque espoir avec ce que je pus me rappeler d’eux. Tour à tour, je me représentai chacun de ceux que j’avais vus et j’essayai de tirer de ma mémoire quelque bon augure d’assistance.

Soudain, j’entendis un chien aboyer, et cela me fit penser à un nouveau danger. Sans prendre le temps de réfléchir — sans quoi ils m’auraient attrapé — je saisis mon bâton et me lançai aussi vite que je pus du côté d’où venait le bruit de la mer. Je me souviens d’un buisson de plantes garnies d’épines coupant comme des canifs. J’en sortis, sanglant et les vêtements en lambeaux, pour déboucher au bord d’une longue crique qui s’ouvrait au nord. Je m’avançai droit dans l’eau, sans une minute d’hésitation, et me trouvai bientôt en avoir jusqu’aux genoux. Je parvins enfin à l’autre rive, et, le cœur battant à tout rompre, je