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les pirates de la mer

tions mystiques auxquelles il s’était abandonné. Il ouvrit la portière, sa valise à la main. Déjà le chef de train donnait le signal du départ. M. Hinchcliff sauta sur le quai.

— Tenez ! — fît une voix derrière lui.

Il vit les yeux brillants et sombres de l’étranger et le fruit doré, velouté et tentant sur la main ouverte de l’homme. Il le prit instinctivement et le train s’ébranla.

— Non ! — cria l’étranger en faisant un geste comme pour le reprendre.

— Attention ! — cria un employé se précipitant pour fermer la portière.

L’étranger, la tête et le bras passés à travers le carreau, cria quelque chose que Hinchcliff ne comprit pas. Puis, l’ombre du pont le cacha et en un clin d’œil il eut disparu. M. Hinchcliff, abasourdi et le fruit merveilleux dans la main, regardait le dernier wagon du train disparaître au tournant de la voie. L’espace d’une minute, son esprit demeura confus ; puis il se rendit compte que deux ou trois personnes sur le quai l’examinaient avec intérêt. N’était-il pas le nouveau Maître de l’École Préparatoire, débutant dans ses fonctions ? Il lui vint à l’idée que le fruit pouvait très bien leur paraître la naïve emplette d’une orange rafraîchissante. Cette pensée le fit rougir et il enfonça le fruit dans la poche de son veston où il fit une bosse ridicule. Mais il n’y avait