Page:Wells - Les pirates de la mer et autres nouvelles, trad Davray, 1902.djvu/248

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
248
les pirates de la mer

légende, qui savaient ce qu’était cet étrange fruit.

Il se tut.

— Et le voici, — fit-il après un silence.

C’était une histoire très extraordinaire pour être racontée dans un compartiment de troisième classe sur une petite ligne de chemin de fer de Surrey. On eût pu croire que le réel n’était qu’un voile pour le fantastique et ici le fantastique était assez évident.

— Vraiment ! — fut tout ce que put répondre M. Hinchcliff.

— La légende, — reprit l’étranger, — conte que ces fourrés d’arbres nains croissant autour du jardin viennent de là pomme qu’Adam tenait à la main quand Ève et lui furent chassés du paradis. Il sentit quelque chose dans sa main, aperçut la pomme à demi mangée et la jeta au loin avec colère. Là, depuis, croissent ces arbres, dans ce vallon désolé, entouré de neiges éternelles, à l’entrée duquel les épées de flammes montent la garde jusqu’au jour du jugement.

— Je pensais, — dit M. Hinchcliff — que tous ces racontars étaient… des fables… des paraboles… plutôt. Voulez-vous dire que là-bas en Arménie…

L’étranger répondit à la question inachevée en tendant le fruit dans sa main ouverte.

— Mais vous n’avez aucune certitude, — dit M. Hinchcliff, — que c’est là le Fruit de l’Arbre de