Page:Wells - Les pirates de la mer et autres nouvelles, trad Davray, 1902.djvu/105

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
105
l’étoile

journaux ronflaient toutes les nuits, et plus d’un prêtre de telle ou telle église refusa d’ouvrir son saint édifice pour favoriser ce qu’il considérait comme une panique absurde.

Les journaux insistaient sur la leçon de l’an mil, car alors aussi les peuples avaient anticipé la fin. L’étoile n’en était pas une — un simple gaz — une comète ; et si c’était une étoile, elle ne pouvait possiblement pas heurter la terre : il n’y avait aucun précédent. Ce même soir, à sept heures quinze, heure de Greenwich, l’étoile devait atteindre sa plus grande proximité de Jupiter. Alors le monde saurait quelle tournure les choses prendraient. Les avertissements du grand mathématicien étaient, par beaucoup, traités d’habile et laborieuse réclame. Enfin, le bon sens, un peu échauffé par la discussion, signifia ses inaltérables convictions en allant se coucher. De même aussi, barbarie et sauvagerie, déjà lassées de la nouveauté, s’en furent à leurs occupations nocturnes, et à part ici et là quelque chien hurlant, le monde des bêtes ne prêtait aucune attention à l’étoile.

Cependant, quand enfin les Européens attentifs virent l’étoile se lever, une heure plus tard il est vrai, mais pas plus grande que la nuit précédente, il y eut encore assez de gens éveillés pour se rire du grand mathématicien, pour considérer le danger comme passé.