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soit musicante, musicale, musicalissime, quand bien même elle ne serrerait pas de très près le sujet du libretto et ne se fondrait pas dans les paroles du poème. Là-dessus, sur ce principe qui appartient à l’esthétique générale, laquelle domine toutes les esthétiques particulières de tel ou tel groupe de musiciens, de peintres et de poètes, il me serait impossible de transiger. Tout le noble plaisir que m’ont donné, quand je les ai entendus à Vienne et à Munich, le premier acte du Lohengrin et le second du Vaisseau fantôme, ne me fera point accepter la théorie wagnérienne pure, qui suppose l’assimilation de deux arts dissemblables, la poésie et la musique, l’identité du drame parlé et du drame chanté, l’équivalence des moyens de la parole et des moyens de l’orchestre. Cette théorie domine un peu trop strictement la critique musicale de M. Jullien. Sa critique, pour tout dire d’un mot, manque de jeu et non de goût. Il la soutient, d’ailleurs, par un savoir étendu et bien distribué. Et ce n’est pas tout des qualités d’esprit ! Pour la critique, telle que l’entend M. Jullien, il faut, avec la science et le goût, une énergie singulière de caractère. Le moral est peut-être, dans M. Jullien, ce qu’on doit le plus admirer. Serviteur intègre et inflexible du vrai, M. Adolphe Jullien ne respecte ni le rang, ni le renom acquis, ni l’âge ni le sexe. On a beau lui dire : « Je suis de