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— et que je m’en allai, impatient et frémissant, au cabinet de lecture de mademoiselle Grassot, pour chercher dans les journaux l’effet que n’avait pu manquer de produire mon début, il n’y avait pas un de ces frivoles gazetiers qui fit mention de mon nom, mais ils parlaient tous de Gustave Claudin. C’était le dernier bon mot de Claudin par ci, le cigare de Claudin par là, Claudin at all, Claudin for ever. Ô agaçant Claudin ! Depuis, M. Alphonse Daudet, bien après moi, a éprouvé à l’endroit de Claudin, la même sensation de basse envie. Il a fort joliment conté lui-même que, à ses premiers pas dans la vie parisienne, la seule vue de Claudin, mollement étendu sur les coussins de son éternelle Victoria, avec son sempiternel cigare à la bouche, avec son inaltérable sourire exprimant le songe incessamment diapré de Paris, le faisait tout ensemble pâlir, transir et brûler. Claudin, lui, était un sommet de la littérature triomphante où il désespérait de monter. Ne serai-je jamais glorieux comme Claudin ? Ne m’entretiendrai-je jamais, comme lui, au foyer du Vaudeville, sur le pied de l’égalité, avec les grâces épanouies et les grâces naissantes, avec Céline, Léonide, Blanche et Athalie ? N’aurai-je jamais comme lui une Victoria de louage qui courra toujours, un cigare qui ne s’éteindra plus, et tout ce qu’il y a de plus célèbre et de plus charmant