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spectateurs » ; c’était, en un mot, l’action, le jeu, la voix trop en relief.

L’action, ainsi conçue, pouvait s’emparer assez complètement du spectateur pour que ses yeux n’eussent pas besoin d’être occupés ou séduits par le décor. Mais si, à l’origine on négligeait le décor, on comprit bien vite qu’il y aurait beaucoup plus d’inconvénients à négliger l’habit. Molière se préoccupa le premier et constamment du costume. La partie de fantaisie qu’il y a dans son théâtre ne lui eût pas permis de laisser de côté les questions se rapportant à cet objet. Il ne pouvait habiller Mascarille, Sbrigani, Scapin, Sganarelle comme des valets de chambre de Conti et de Julie d’Angennes.

Le souci du costume naquit donc de bonne heure ; mais il resta longtemps secondaire. La règle était que chaque comédien se procurât lui-même sa garde-robe. Tous n’ayant pas même fortune, les ensembles eussent été fort disparates à l’œil si l’usage avait admis que les comédiens les mieux rentés fissent assaut entre eux de quantité et de variété, pour leur garde-robe, comme ils faisaient assaut de magnificence et de richesse. On ne possédait pour la tragédie que trois types d’habit : l’habit du jour, l’habit espagnol et l’habit antique, qui étaient employés selon le caractère du drame et l’époque où il se passait. Il n’est pas besoin de dire que l’habit anti-