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empereur. Mais le ferment démocratique est le premier et le plus persistant. De la préconisation constante du peuple et de la multitude, de complicités superbes et violentes du poète avec les révoltes de l’âme populaire contre tout ce qui est classification sociale inflexible, bureaucratie déprimante, ordre desséchant, pouvoir indigne, Victor Hugo a tiré l’unité morale de sa vie et de ses œuvres. Pensionnaire de Louis XVIII et de Charles X, pair de France de Louis-Philippe, héraut d’armes et promoteur pendant l’année 1848 du prince Louis Napoléon, peu importe, Victor-Hugo n’a pas cessé d’exalter parmi ces phases diverses l’en-bas contre l’en-haut. J’admire les gens qui crient à la palinodie, et qui prétendent sérieusement que la démocratie, qu’il a soutenue et poussée jusqu’à l’apologie de la Commune de 1871 ou à peu près, est une opinion de circonstance qu’il s’est fabriquée arbitrairement après des mécomptes personnels d’ambition, au lendemain de l’élection présidentielle du 10 décembre 1848. Ils n’ont donc jamais lu Hernani, qui a été écrit par le pensionnaire de Charles X ! Ils n’ont donc jamais lu le Roi s’amuse et Ruy-Blas, qui ont été composés par le futur pair de Louis-Philippe ! Ils n’ont donc jamais lu l’oraison prononcée le 19 décembre 1832 au Tribunal de commerce, où gronde une colère toute tribunitienne, où le poète fait presque