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On doit faire cas des Ménechmes de Rotrou, au moins à titre de document pour l’histoire littéraire et pour l’histoire de la langue française. Rotrou, parmi les pièces, au nombre de trente-six, qu’il a écrites, nous a laissé un Amphitryon, des Ménechmes et une Iphigénie en Aulide. On conviendra qu’il avait eu là trois bonnes idées si depuis, malheureusement, Molière, Regnard et Racine ne les avaient reprises. Rotrou est une espèce de maréchal des logis fourrier de notre littérature ; il est parti en avant-garde ; il a préparé les gîtes. Dans ses Ménechmes, on doit surtout remarquer la langue ; elle est d’une élégante facilité ; elle est faite ; nulle scorie n’y reste, si ce n’est la syntaxe un peu fantasque des participes. Or, les Ménechmes sont de 1632, et le Cid n’est que de 1636 ; on parlait donc déjà un français tout formé au théâtre avant le Cid. Rotrou, pour faire passer dans notre langue les Ménechmes de Plaute, a transformé le ton, relevé les caractères, épuré les mœurs. Il a d’ailleurs pris et adopté les divers personnages de Plaute avec leurs noms, sauf qu’il s’est borné à changer le nom du parasite Pœnulus en celui d’Ergaste et d’affubler la femme de Ménechme, qui dans Plaute est appelée tout bonnement Mulier, du nom d’Orazie. Il a suivi scène par scène et pas à pas la structure de la pièce du poète ancien pour le premier et le second acte ;