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fières et moins romaines pour peindre son ambition contente et qui ne désire plus rien, lorsqu’elle apprend que le Sénat a cédé devant elle.


Ma gloire ne peut croître et peut se démentir.
Elle passe aujourd’hui celle du plus grand homme,
Puisqu’enfin je triomphe et dans Rome et de Rome.
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J’y tremblais sous la haine et sa laisse impuissante ;
J’y rentrais exilée et j’en sors triomphante.


Oui, cela est superbe ; toute la dernière scène se sent de cette allure ; aussi eut-elle un vif succès le 28 novembre 1670 sur le théâtre de la troupe de Molière ; elle soutint, ce jour-là, et enleva la pièce ; « la catastrophe », comme on disait alors, fut louée et admirée de tout le monde ; et peut-être, grâce à des vers comme ceux que nous venons de citer, le dénouement et la dernière scène de Corneille nous paraîtraient aujourd’hui encore admirables si nous ne possédions la dernière scène et le dénouement de Racine.

Le drame de Racine offre un défaut qui tient au sujet choisi. Il n’y aurait ni drame ni nœud du drame sans le préjugé romain contre les rois, les reines et l’étranger. Le préjugé est l’obstacle au bonheur de Bérénice ; c’est à ce préjugé que Titus sacrifie son amour. Un spectateur qui n’est pas suf-