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a de plus sacré dans les faits et la tradition sacrée, c’est la passion, la mort et la résurrection du Seigneur qui a tenté avant tout le théâtre. Un historien littéraire n’aurait pas besoin de beaucoup d’érudition, mais il aurait besoin de beaucoup de patience à supporter les lectures fastidieuses, pour rétablir entre les Mystères et les deux tragédies bibliques de Racine la chaîne ininterrompue des œuvres poétiques ou prétendues telles publiées en langue française, dont l’argument a été puisé dans les livres juifs, dans les Évangiles et dans les légendes de saints.

Les œuvres sont donc nombreuses. Mais la plupart ne s’attachent à tirer du fait religieux que l’expression dramatique, le pittoresque, l’effet humain, et souvent, comme les Mystères, par le procédé le plus brutal et le plus grossier, ou, si elles prétendent à expliquer et à faire sentir la foi, la platitude de la conception et de l’exécution les réduisent trop au-dessous des ambitions, affichées par les auteurs. C’était l’une des thèses vivement débattues de la querelle des Anciens et des Modernes de savoir si les dogmes et les mystères de la foi se prêtent ou non à l’élaboration des poètes et aux fictions de la poésie. L’ami et le conseiller de Racine, Boileau, répondait non. L’idée circonscrite que Boileau se faisait de la poésie, jointe à ce qu’il