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et des procédés selon lesquels se déroulent ces tableaux variés. D’ailleurs, il y a une réflexion que provoque le Tour du Monde, comme beaucoup d’autres pièces où la machinerie joue le grand rôle. On se demande s’il n’existe pas une esthétique de la machinerie et si le machiniste et les auteurs en respectent toujours les lois. Le théâtre est un relief ou une fresque de la vie et des passions. Il a pour objet de tailler, de sertir, d’agrandir le vrai de manière à le mieux faire voir, à le mieux faire sentir, à le présenter plus en son plein et sous des aspects plus saisissants. Appliquez ce principe à la machinerie : Il faut qu’elle me présente au théâtre une force, une finesse ou un charme de surprise dont elle m’aura paru dépourvue dans le monde réel. Or, quand je vois dans le Tour du Monde l’express du Pacifique, qui se lance sur la scène avec une vitesse d’un kilomètre à l’heure, qui se compose d’une locomotive poussive traînant trois wagons étriqués, d’où il descend six voyageurs en tout, certes, je ne me dissimule pas tout ce que le machiniste du théâtre a dépensé d’ingéniosité pour construire ces joujoux, tout ce qu’il déploie de dextérité de main pour les manœuvrer sans les casser ; mais l’effet produit d’abord sur moi, l’effet tout brut de ce chemin de fer en carton peint, est un effet de grotesque. Pourquoi ? parce que la ma-