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en tout cas, ne nous en donnera pas d’autre. Il ne s’embarrassera, en aucune manière, de préparer une explication physique ou morale du phénomène. Ç’a été, en cette saison théâtrale, un accident ordinaire et quotidien de rencontrer dans les pièces des jeunes gens corrects et parfaitement élevés, tout pétris même de sentiments chevaleresques, qui entreprennent de violer l’objet de leur flamme, au premier tête-à-tête ; des espions qui sans rime ni raison, déclarent franchement, au beau milieu d’une place assiégée, l’innocent emploi qu’ils remplissent ; des duchesses, entichées de la qualité et monomanes de la race, qui finissent par se faire bergères, à la face de M. le curé et de M. le maire, afin d’épouser un berger ; des maris, taillés sur le patron d’Othello et du tigre du Bengale, qui enferment leur femme à triple serrure dans leur château d’Angleterre, et qui, rencontrant quelques semaines après l’honnête lady dans les savanes du Nouveau Monde, errante, libre et pas tout à fait seule, la présentent généreusement à l’assistance en qualité de leur femme légitime, sans avoir éclairci ni éprouvé le besoin de s’éclaircir pourquoi elle est là, et pas plus jaloux désormais de cette femme vagabonde que don Juan ne l’est de doña Elvire.

Voulez-vous, par le détail, des exemples de ces métamorphoses sans nuance et sans ménagement,