Page:Weiss - À propos de théâtre, 1893.djvu/126

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

saurait vouloir connaître sans excéder son droit et ses moyens, et la contrefaçon, délit relatif à l’exercice du commerce, délit brutal et matériel, qu’il n’y a aucune difficulté juridique à saisir et à réprimer. Durant la période comprise entre 1793 et 1860, le juge s’est attaché, avant tout, à respecter et à défendre la liberté de translation des sujets et des idées d’un genre dans un autre. Il admettait qu’on pouvait emprunter à un roman le sujet d’un drame (affaire Boigne contre Scribe, 1854). S’il lui arrivait d’accorder une indemnité à l’auteur d’un roman qu’un autre auteur avait transformé en pièce de théâtre, il fixait vraiment l’indemnité au plus juste taux (affaire Paul de Musset contre Labiche). Il ne contestait pas d’abord la liberté de traduire. Si en 1840, dans l’affaire Rosa contre Gérardin (traduction en espagnol sur territoire français d’un Traité élémentaire de chimie, publié en français), il déclarait que la traduction pouvait être contrefaçon, c’était à propos d’une espèce où le commerce de la librairie, et non point l’art, était intéressé. Dans les cas de cette sorte, le juge prenait soin d’indiquer, par ses considérants, que, pour une espèce où il s’agirait d’une œuvre poétique, comportant l’inspiration, le génie, l’emploi de talents distingués, il se réservait la faculté de décider tout autrement. À partir de 1851 a été inaugurée, dans l’interprétation de la loi de 1793,