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tous les Modernes, l’un après l’autre, de Bois-Robert, de Desmarets, de Fontenelle fut de prétendre joindre l’exemple au précepte. Quand les gens de goût lisaient les Pastorales de Fontenelle, après ses Nouveaux Dialogues des morts, il leur semblait bien que Fontenelle n’avait pas vaincu Théocrite. Perrault commença par commettre la même faute courageuse que ses prédécesseurs et ses compagnons de combat. Lui aussi, en même temps qu’il prêchait les bonnes maximes, se mit à les appliquer intrépidement. Il composa l’idylle héroïque de Saint-Paulin, en six chants, moderne, à ce qu’il disait, et chrétienne (1686). Mais, hors le choix des personnages et du sujet, rien n’est inantique dans le Saint-Paulin ; tout y est déplorablement suranné ; tout rappelle les anciens moules, mais déformés ; c’est du Virgile contourné, dilué, affadi, aplati. Ce Saint-Paulin donne l’avant-goût des épopées de l’époque impériale et des définitions ingénieuses par périphrase, chères à l’école de Delille ; c’est tout le moderne qu’inventait Perrault, passant de la spéculation à la pratique. Il fit ensuite Grisélidis, où l’on peut cueillir çà et là des choses charmantes (1691) ; cette fois, il entrevoyait la direction juste. Il fit Peau d’Âne en vers (1694) ; il brûlait. Ce n’était pourtant pas encore Peau d’Âne en vers qui pouvait passer pour du moderne de bien haut prix.