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Nous gravissions lentement la côte de la Chalaide, encaissée entre deux tâlus de vignes. 'En avant, sûr le soj argileux de la montée, se détachaitla droite et haute silhouette'du grand-père, çoiffée d'une casquette de cuir 4 oreillettes, le carnier en sautoir sur sa blouse, les jambes maigres et nerveuses protégées par des houseaux de toile bleue. En moins d'une demi-heure, nous atteignions lès taillis du Petit Juré, dont les lisières bordaient tout un côte d'ùne plaine mamelonnée et nue. Le bois de mon grand-père, çcï) tenant à peine trois arpents, me semblait im- mense. Au milieu, se trouvaient deux carrés? de jardin^ une ^maisonnette de pierre- couverte en planches, et un chambret de 'charmille où l'on dînait. 1 Il Dès en arrivant, môlï grand-père allumait sa pipe, puis se ^mettait à greffer des sauvageons ou 'à sarcler les allées. Moi, j'avais la bride sur le cou. J'en profitais pour m'enfoncer dans le fourré et pousser des pointes jusqu'aux friches du Voisinage guettant les oiseaux, observant le va-et-vient des fourmis dans les sentiers, pourchassant les papillons, me familiarisant ave les bêtes et les plantes des bois. J'allumais des feux de ,branches saches au revers d'un fossé, je grimpais aux arbres, je tediuf&is indistinctement mes poches et mon estomac de tous les fruits sauvages noisettes,-faines, alises et glands. Je me vautrais dans l'herbe, je me grisais de verdure. Je conrau- niais avec la terre, et lentement la nature forestière se révélait à moi. Parfois étendu sur le sol, bercé par le frémis- ssement des feuilles, regardant à travers les ramures la blanche !fuite des nuages sur le ciel, toute ma mythologie me reve- inaiten tête, etje croyais .sentir passer cotame un frisson le rsoufple des .Hamadryades (1), ou entendre au loin la flûte du dieu Vi.s -• ÀNDUÉ Theurict, Années dé printemps (OUendorff, édit.). L'Aventure de la pie Chateaubriand ne reata pas toujours au château de Combourg; il fallut aller au collège, se plier à la discipline, après la vie indépen- dante. On le mil au collège dé Dol, LORSQUE LE TEMPS était BEAU, les pensionnaires du collège sortaient le jeudi et le dimanche. On nous menait souvent au l. Bamadryadfis nymphes des bois que l'on croyait enfermées dans les arbres. 2. Pan dieu des troupeaux, qui accompagnait le cortège de Bacchus et faisait danser les nymphes au son de la flûte pastorale.