Page:Weil - Sur la science, 1966.djvu/121

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

matière, mais quant à leur rapport avec l’homme, avec la pensée humaine. Il faudrait tirer au clair et ordonner en séries tous les rapports impliqués dans le maniement de tous les instruments de travail, que ces rapports soient confusément aperçus par ceux qui les manient, ou aperçus clairement par quelques privilégiés placés plus haut dans la hiérarchie du travail dans l’industrie, deux ou trois ingénieurs par entreprise, peut-être), ou, ce qui doit arriver souvent, aperçus par personne. Au point de rencontre de ces deux séries d’efforts critiques se trouverait une physique véritable, ou du moins la partie de la physique qui concerne les phénomènes qui sont matière du travail humain ; il y aurait à construire à côté de cette physique, et par analogie avec elle, mais sur un plan bien distinct, l’étude des phénomènes qui ne sont qu’objets de contemplation.

Vous excuserez, j’espère, la confusion, le désordre, et aussi l’audace de ces embryons d’idées. S’ils ont une valeur quelconque, leur développement ne peut évidemment s’opérer que dans le silence. Mais ce développement supposerait néanmoins — malheureusement — un travail collectif que je verrais ainsi. D’abord un bilan des applications de la mathématique, ou plutôt des diverses formes de calcul mathématique, prises une par une, bilan dressé, bien entendu, dans la mesure du possible, en se référant non pas simplement au moment présent, mais au développement de la science et de la technique dans l’histoire des trois ou quatre derniers siècles pour le moins. Ensuite des monographies concernant les métiers, portant toutes sur le même thème, à savoir : quelle est au juste l’activité de la pensée qu’implique la fonction d’un manœuvre sur machines — d’un manœuvre spécialisé — d’un tour-