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Portrait très court de Renaud. (N. B. Jaffier a-t-il dormi entre I et II ? Entre II et III, il ne dort pas.)



Scène V


PIERRE, JAFFIER, RENAUD


PIERRE, à Renaud.

Je m’en vais, et je suis plus tranquille pour le succès de notre entreprise que si je restais. Vous pouvez m’en croire ; je connais mon ami ; pas un de nous n’est fait comme lui pour les grandes choses. Il est de loin supérieur à nous tous, et il le montrera. Quel bonheur qu’il soit là pour me remplacer ! Autrement, je partirais très inquiet. Je n’ai jamais eu peur dans ma vie, quoique j’aie traversé beaucoup de périls ; mais j’avoue que s’il est une chose capable de me faire trembler, ce sont les tortures raffinées de la République de Venise. Tout le monde dit que même un héros ne pourrait pas y résister. La possibilité de tomber vivant aux mains du Conseil des Dix me ferait frémir de peur si pareille chose était à craindre. Mais avec mon ami pour diriger l’entreprise de cette nuit, il n’y a aucun danger. Nous avons tout prévu ; sa résolution, son audace, sa prudence sont incomparables. Le succès est infaillible. Instruisez-le, Renaud, comme vous m’avez instruit. À bientôt, ami ; je ne te quitte que pour un jour. Demain,