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JAFFIER

Oui.

PIERRE

Et — excuse-moi de te poser cette question, je connais la réponse, mais mon devoir m’y oblige — tu es prêt pour assumer le commandement d’une si glorieuse entreprise, n’est-ce pas ? Tu n’as ressenti aucune crainte, aucun trouble à voir la date de l’action s’approcher ?

JAFFIER

Aucune crainte certes ; que peut-il y avoir à craindre dans une entreprise si bien préparée ? Je serai heureux de commander une si grande action, de commander un groupe d’hommes si vaillants, si unis, tel qu’on en voit un peut-être en plusieurs siècles. Aucun trouble, non — sinon que cette nuit, quand Renaud a parlé, je n’ai pu m’empêcher d’être un peu troublé par la pitié à l’idée du saccage de la ville.

PIERRE

Ah ! c’est donc là ce qui t’a fait pâlir ! Mais ce n’est rien, cela. Beaucoup de grands hommes ont éprouvé un instant de pitié, et même en ont versé des larmes, sur le point d’accomplir une grande