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défaillance. Il craint leur perte à tous et, pour y remédier, propose de faire mourir Jaffier. Horreur de Pierre, protestations ; il se porte garant de Jaffier. Il connaît sa vaillance, sa fidélité, sa tendresse pour ses amis. Jaffier est entré dans la conjuration par amitié pour Pierre (rappelle comment). Il y est entré, il a prêté serment, par pure amitié pour Pierre, sans même savoir de quoi il s’agissait, alors qu’il était loin de Venise. Pierre l’a fait venir pour la conjuration (?). Et il trahirait cette amitié ? Pourquoi ? Il aurait peur ? Jaffier n’a jamais eu peur. Lui, vaillant, impétueux, téméraire pour aider ceux qu’il aime… Renaud insiste. Il a beaucoup d’expérience, il connaît très bien ce type d’hommes, qui s’engagent dans de grandes entreprises, mais défaillent au moment d’en arriver à l’exécution. C’est précisément au moment où Renaud décrivait l’exécution que Jaffier a changé de visage. On ne peut pas, des actes de courage de sa vie précédente, conclure à son courage pour une conjuration. Une conjuration demande un courage d’une espèce particulière, et le cœur peut y manquer à un homme prêt à affronter beaucoup d’autres périls. Le seul remède en pareil cas, c’est la mort. C’est triste, certainement ; Renaud aussi aime Jaffier ; mais c’est nécessaire. Qu’est-ce qu’une vie humaine quand on s’apprête à changer le monde ? Pierre essaie de montrer que, même du seul point de vue de la conjuration, on ne peut pas faire mourir Jaffier. Il est tellement aimé, admiré et respecté qu’il ne peut pas disparaître sans qu’on s’en émeuve. Soit que Renaud donne ou non aux conjurés la véritable explication, le trouble sera grand. Pierre appelle un officier.