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Mon ami va mourir, mon seul ami, tout ce que j’aime ?
Assassin, menteur, lâche ! Et vous me regardez en face,
Moi, votre bienfaiteur, dont la pitié vous a sauvé !
Ah ! vous m’avez trompé ! Comme ils m’ont menti lâchement.
Mais ce n’est pas fini. Je vais les punir, ces ingrats,
Vous d’abord. Gardez-vous. Le sang maintenant va couler.
Ah ! leur sang va couler, couler à flots, sous mon épée.

LE SECRÉTAIRE
Bassio, désarme-le.
JAFFIER

Vous m’avez désarmé ! Croyez-vous m’avoir abattu ?
Lâche, vous espérez me réduire à vous supplier ?
Je ne le ferai pas. Plutôt la mort et la torture
Pour mes amis, pour moi, pour tout ce qui m’est cher au monde,
Oui, mille morts plutôt que de m’abaisser devant vous.
Attendez ! il viendra, l’instant de votre châtiment !
La cité que je hais, où tout est vil, cruel et bas,
Je la verrai crouler, malgré son orgueil, en un jour.
Mes yeux verront le feu la dévorer de part en part.
Et les uns, parmi vous, devront voir souiller ce qu’ils aiment,