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oblige à croire que les commandements de conquête et de rapine et les promesses temporelles contenues dans l’Ancien Testament étaient de source diabolique et non divine.

Ou, si on veut, par une de ces ironies du destin, presque comparables à des calembours, qui sont un thème favori de la tragédie grecque, ces promesses émanaient des puissances du mal dans leur sens littéral, et de Dieu seulement dans leur sens caché, comme annonces du Christ.

Les dieux grecs aussi étaient mélangés de bien et de mal ; ou plutôt, dans l’Iliade, ils sont tous démoniaques, sauf Zeus. Mais aussi les Grecs ne prenaient pas leurs dieux au sérieux. Dans l’Iliade, ils fournissent les intermèdes comiques, comme les clowns dans Shakespeare. Au lieu que les Juifs prenaient Jéhovah très au sérieux.

Le seul enseignement direct sur la divinité contenu dans l’Iliade est le tableau de Zeus prenant sa balance en or pour y peser les destinées des Grecs et des Troyens, et obligé de laisser la victoire aux Grecs, quoique son amour aille aux Troyens à cause de leur piété.

Cela seul met l’Iliade infiniment au-dessus de tous les livres historiques de l’Ancien Testament, où il est répété à satiété qu’il faut être fidèle à Dieu pour avoir la victoire dans la guerre.

Au reste, un poème comme l’Iliade ne pourrait pas avoir été écrit sans véritable charité.

Quand une jeune fille se marie, ses amis ne pénètrent pas dans les secrets de la chambre conju-