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foi catholique deviennent de plus en plus forts, de plus en plus profondément enracinés dans le cœur et l’intelligence. Mais en même temps les pensées qui m’éloignent de l’Église gagnent elles aussi en force et en clarté. Si ces pensées sont vraiment incompatibles avec l’appartenance à l’Église, il n’y a donc guère d’espoir que je puisse jamais avoir part aux sacrements. S’il en est ainsi, je ne vois pas comment je peux éviter de conclure que j’ai pour vocation d’être chrétienne hors de l’Église. La possibilité d’une telle vocation impliquerait que l’Église n’est pas catholique en fait comme elle l’est de nom, et qu’elle doit un jour le devenir, si elle est destinée à remplir sa mission.

Les opinions qui suivent ont pour moi des degrés divers de probabilité ou de certitude, mais toutes sont accompagnées dans mon esprit d’un point d’interrogation. Je ne les exprimerai à l’indicatif qu’à cause de la pauvreté du langage ; j’aurais besoin que la conjugaison contienne un mode supplémentaire. Dans le domaine des choses saintes, je n’affirme rien catégoriquement. Mais celles de mes opinions qui sont conformes à l’en-