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accueille par de dures réprimandes l’avis prudent de Polydamas :


« À présent que j’ai reçu du fils de Cronos rusé
La gloire auprès des vaisseaux, acculant à la mer les Grecs,
Imbécile ! ne propose pas de tels conseils devant le peuple.
Aucun Troyen ne t’écoutera ; moi, je ne le permettrais pas. »
Ainsi parla Hector, et les Troyens de l’acclamer


Le lendemain Hector est perdu. Achille l’a fait reculer à travers toute la plaine et va le tuer. Il a toujours été le plus fort des deux au combat ; combien davantage après plusieurs semaines de repos, emporté par la vengeance et la victoire, contre un ennemi épuisé ! Voilà Hector seul devant les murs de Troie, complètement seul, à attendre la mort et à essayer de résoudre son âme à lui faire face.


Hélas ! si je passais derrière la porte et le rempart,
Polydamas d’abord me donnerait de la honte
Maintenant que j’ai perdu les miens par ma folie,
Je crains les Troyens et les Troyennes aux voiles traînants
Et que je n’entende dire par de moins braves que moi :
« Hector, trop confiant dans sa force, a perdu le pays. »
Si pourtant je posais mon bouclier bombé,
Mon bon casque, et, appuyant ma lance au rempart,
Si j’allais vers l’illustre Achille, à sa rencontre ?
Mais pourquoi donc mon cœur me donne-t-il ces conseils ?
Je ne l’approcherais pas ; il n’aurait pas pitié,
Pas d’égard ; il me tuerait, si j’étais ainsi nu,
Comme une femme


Hector n’échappe à aucune des douleurs et des hontes qui sont la part des malheureux. Seul, dépouillé de tout prestige de force, le courage qui l’a maintenu hors des murs ne le préserve pas de la fuite :