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Toute géométrie procède de la Croix.

Le beau, c’est le contact du bien avec la faculté sensible. (Le réel est la même chose.)

Le vrai, c’est le contact du bien avec l’intelligence.

Tous les biens d’ici-bas, toutes les beautés, toutes les vérités sont des aspects divers et partiels d’un bien unique. Par suite ce sont des biens à ordonner. Les jeux de puzzle sont une image de cette opération. Tout cela, vu du point convenable et convenablement relié, fait architecture. Cette architecture permet d’appréhender le bien unique et non saisissable.

Toute architecture est un symbole de cela, une image de cela.

L’univers entier n’est qu’une grande métaphore.

L’astrologie, etc., constituent des reflets dégradés de cette connaissance de l’univers comme métaphore, peut-être des tentatives — mais illégitimes (il me semble) — d’en trouver des preuves matérielles. De même l’alchimie.


Supplier, c’est attendre du dehors la vie ou la mort. À genoux, la tête inclinée, dans la position la plus commode pour que le vainqueur, d’un coup d’épée, tranche le cou ; la main touchant ses genoux (mais probablement, primitivement élevée au-dessus) pour recevoir de sa compassion, comme de la semence d’un père, le don de la vie. Dans le silence quelques minutes d’attente s’écoulent ainsi. Le cœur se vide de tous ses attachements, glacé par le contact imminent de la mort. Une vie nouvelle est reçue, faite purement de miséricorde.

Il faudrait prier Dieu ainsi.

L’attente est le fondement de la vie spirituelle.

La piété filiale n’est qu’une image de l’attitude envers Dieu.

Si l’âme criait vers Dieu sa faim du pain de vie, sans aucune interruption, infatigablement, comme crie un nouveau-né que sa mère oublie de faire téter…

Que ces cris que je poussais quand j’avais une ou deux semaines résonnent en moi sans interruption pour ce lait qui est la semence du Père.