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la racine des fautes, et de couper d’un coup. Il ne restera alors que de mauvaises habitudes à dompter par un travail pénible. Il y a encore de la perversité.

ἀπεθάνετε, καὶ ἡ ζωὴ ὑμῶν κέκρυπται σὺν τῷ Χριστῷ ἐν τῷ θεῷ

On ne peut aimer le prochain que d’un amour de compassion. C’est le seul amour juste.

Même dans : οὐαὶ ὑμῖν, il y a de la compassion.

Aimer les hommes comme le soleil nous aimerait s’il nous voyait.

δειλοῖσι βροτοῖσιν

Le soleil supposé pensant est modèle de perfection.

Combien Dieu a de manières de se donner !

La compassion rend l’amour égal pour tous. Le mépris du crime et l’admiration de la grandeur ont leur juste point dans la compassion.

Le dogme de la Trinité est nécessaire pour qu’il n’y ait pas dialogue de nous avec Dieu, mais de Dieu avec lui-même en nous. Pour que nous soyons absents.

Dieu résidant dans la nourriture. Agneau, pain. Dans la matière fabriquée par du travail humain, pain, vin.

Cela devrait être le centre de la vie paysanne. Par son travail le paysan, s’il a cette intention, donne un peu de sa chair pour qu’elle devienne la chair du Christ.

Il devrait être consacré.

La sainteté est une transmutation comme l’eucharistie.

Pour qu’un homme soit réellement habité par le Christ comme l’hostie après la consécration, il faut qu’au préalable sa chair et son sang soient devenus matière inerte, et de plus comestible pour ses semblables. Alors cette matière peut devenir par une consécration secrète chair et sang du Christ. Cette seconde transmutation est l’affaire de Dieu seul, mais la première est en partie notre affaire,

Il suffit de regarder ma chair et mon sang comme de la matière inerte, insensible, et comestible pour autrui.

« Ne pas s’écouter », « il faut bien », — le stoïcisme populaire contient le germe de cela.

Si le travail de labourer me fait maigrir, ma chair