Page:Weil - La Connaissance surnaturelle, 1950.djvu/336

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’a péché ni ses parents, mais afin que fussent rendus manifestes les actes de Dieu en lui ».

Rapprocher de « Ce qu’il a souffert lui a enseigné l’obéissance ».


Le mécanisme de la royauté peut se voir dans l’histoire de l’homme qui est venu demander au Christ de partager l’héritage entre son frère et lui. En refusant il a refusé d’être roi des Juifs, ce qui obligeait les Pharisiens à refuser de le reconnaître comme Messie ; et comme il était assez influent pour attirer sur la Judée la haine des Romains, et se refusait à la fonction qui lui aurait permis de la protéger, ils ont cru de leur devoir de le faire mourir. Si on se place à l’intérieur du patriotisme hébraïque, cela était tout à fait légitime.

Toutes les fois que dans une société non organisée un homme donnait des signes d’inspiration, on en faisait un arbitre et peu à peu il devenait roi.


« Père, donne-moi ma part » (parabole du fils prodigue). Ma part, c’est l’autonomie. Je la dépense avec les prostituées.

« Les esclaves dans la maison de mon Père ont du pain. » Le pain, c’est le bien. Les esclaves, c’est la matière inerte. On souhaite devenir comme de la matière inerte pour cesser enfin de désobéir.

On n’en arrive là qu’au bout d’un processus d’épuisement qui prend du temps. Le garçon a d’abord dépensé tout son argent. C’est quand il a tout dépensé et qu’il a faim qu’il souhaite être un des esclaves de son père.

C’est quand on a épuisé les capacités des facultés naturelles qu’on porte en soi (volonté, intelligence, disposition naturelle à aimer) pour la production du bien, quand on s’est reconnu incapable de tout bien, qu’on tombe prosterné devant Dieu.

« Nous sommes des esclaves sans valeur. » Il n’est rien au-dessus de cela pour une créature humaine. Pour du verre il n’y a rien de plus que d’être absolument transparent. Il n’y a rien de plus pour un être humain