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partir de là concevoir la création progressive du blé, qui, si la cueillette des graines est un rite et un sacrement, a constitué une collaboration entre Dieu et l’homme. On comprend alors qu’il se soit établi autour une religion.


Eschyle dit, citant évidemment une parole sacrée des Mystères, τῷ πάθει μάθος. Par la souffrance l’enseignement (accordé par Dieu à l’homme). Mais il ne dit pas en quoi consiste la sagesse enseignée. On le voit quand on lit dans saint Paul la même formule complétée — où se retrouve le même jeu de mots entre πάθος et μάθος, caractéristique d’une formule sacrée — ἔμαθεν ἀφ´ ὧν ἔπαθεν τὴν ὑπακοήν, ce qu’il a souffert lui a enseigné l’obéissance.

Cette sagesse, c’est l’obéissance.

Mais avait-il donc désobéi ?

Y aurait-il une version secrète dans laquelle, à la désobéissance humaine par manque d’amour, répondrait une désobéissance divine par excès d’amour, Dieu se désobéissant à soi-même par compassion pour les hommes ? Ce serait exactement le mythe de Prométhée.

Or l’histoire et le nom de Prométhée semblent une illustration de la parole τῷ πάθει μάθος.

Dieu désobéissant à Dieu et ramené à l’obéissance par l’expiation.


Le châtiment de l’homme dans la Genèse, en dehors de la mort, consiste exclusivement dans la soumission imposée. Travail et mort : passivité de la femme dans l’amour et l’enfantement.

Le travail est quelque chose de semblable à la mort. C’est une soumission à la matière.

Mais la beauté est un piège de Dieu pour nous faire consentir à l’obéissance dans laquelle il nous ramène par contrainte.

Le châtiment doit être une imitation de Dieu.

Ramener le criminel dans l’obéissance par la contrainte, avec infliction de douleur, en lui tendant des pièges en vue de susciter quelque jour le consentement.

Il y a échec toutes les fois que le coupable meurt sans