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Seulement l’homme n’a le droit de détruire que ce qui lui appartient ; c’est-à-dire non pas même son corps, mais exclusivement sa volonté.

Avant de boire, on jette une goutte ; c’est la donner à Dieu. Une seule goutte dans une coupe, c’est la proportion de ce que l’homme peut donner à Dieu de sa vie. S’il parvient à donner cela, il est sauvé.

La goutte qu’on jette, c’est une dépense gratuite d’énergie. Toute dépense gratuite d’énergie est un don fait à Dieu et une destruction d’une partie de la volonté.

Cette goutte qu’on jette, on la jette hors du monde, de l’autre côté de l’horizon, de l’autre côté du ciel.

Une seule goutte, mais pour laquelle on ne demande rien en échange.

Le Christ s’est donné ainsi tout entier.

En quel sens est-ce que le Christ a expié pour l’humanité ? Expier, c’est restituer ce qu’on a pris injustement. L’humanité : avait volé le libre arbitre, le choix du bien et du mal. Le Christ l’a rendu en apprenant l’obéissance. La naissance est une participation au vol d’Adam. La mort est une participation à la restitution du Christ. Mais cette participation ne sauve que si elle est consentie.

Le salut est de consentir à mourir.


Abel est le premier mort. Abel n’est-il pas la première incarnation du Verbe ? Le premier-né des morts ? Est-ce le Pan des Égyptiens ? Et est-ce lui (plutôt qu’Osiris) dont on célébrait la Passion à Saïs ?

(Chercher les œuvres de cet Égyptien qui assimilait les Hébreux aux Hyksôs.)


La naissance nous met dans le péché originel, la mort nous en retire. La Croix du Christ comme étant le parfait modèle de la mort, la mort en soi, au sens platonicien, nous a tous rachetés. Mais si nous consentons à être nés et non pas à mourir, nous commettons personnellement pour notre perte le péché d’Adam.

Dieu seul peut naître sans péché originel. Car pour Dieu naître est renoncer. La naissance du Christ est