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brouillage empêche d’être sûr qu’on a été entendu, et que de toutes manières la répétition est une nécessité pédagogique, on ne peut dire qu’un nombre de choses limité.

Dès qu’on passe au domaine de l’action, les limites sont encore plus étroites. Il faut opérer un nouveau choix, d’après les critères déjà esquissés.

La manière dont un mobile se transforme en acte est une chose à étudier. Un même acte peut être produit par tel mobile, ou tel autre, ou encore tel autre ; ou par un mélange ; au contraire tel autre mobile peut n’être pas susceptible de le produire.

Pour amener les gens non seulement à accomplir telle action, mais encore à l’accomplir par l’impulsion de tel mobile, le meilleur procédé, peut-être le seul, semble consister dans l’association établie au moyen de la parole. C’est-à-dire que, toutes les fois qu’une action est conseillée par radio, ce conseil doit être accompagné de l’expression d’un ou de quelques mobiles ; toutes les fois que le conseil est répété, le mobile doit être de nouveau exprimé.

Il est vrai que les instructions précises sont communiquées par une voie autre que la radio. Mais elles devraient toutes être doublées par des encouragements transmis par radio, portant sur le même objet, désigné seulement autant que le permet la prudence, avec les précisions en moins et l’expression des mobiles en plus.

L’action a une seconde vertu dans le domaine des mobiles. Elle ne confère pas seulement la réalité à des mobiles qui, auparavant, existaient dans un état semi-fantomatique. Elle fait aussi surgir dans l’âme des mobiles et des sentiments qui auparavant n’existaient pas du tout.

Cela se produit toutes les fois que soit l’entraînement soit la contrainte des circonstances fait pousser l’action au delà de la somme d’énergie enfermée dans le mobile qui a produit l’action.

Ce mécanisme — dont la connaissance est essentielle aussi bien pour la conduite de sa propre vie que pour l’action sur les hommes — est également susceptible de susciter du mal ou du bien.

Par exemple, il arrive souvent qu’un malade chronique, dans une famille, soigné tendrement par l’effet d’une sincère affection,